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GINOUX CHARPIN

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Les ascendants de Jeanne DEFERMON et Philibert GINOUX sont indiqués par la couleur bleu
 

Quittant le village de Millery (Rhône), César GINOUX « monte » à Paris à l’âge de 16 ans, en 1762, hébergé probablement chez son oncle Joseph, Maître de pension à l’université de Paris. Il démarre sa carrière en 1766 dans l’administration du Domaine du Roi (Louis XV) comme employé de bureau. Il gravit peu à peu tous les échelons : commis, sous directeur, directeur, puis administrateur des Domaines du Roi. Fréquentant la Cour du Roi et ayant les faveurs de Madame de POMPADOUR, il obtient de faire partie des « Carrosses du Roi ». Cette charge consiste à prélever un droit sur chaque voiture publique autorisée par le Roi.

Le 30 janvier 1772, il est présent à l’inventaire suite au décès à Paris de son oncle Joseph GINOUX. Il est alors, sous directeur des domaines de Normandie.

Il se marie dans l’église de Saint Germain l’Auxerrois le 4 janvier 1779 avec Jeanne CHARPIN veuve de François Louis GAUCHÉ, marchand bourgeois de Paris. Elle est issue d’une famille lyonnaise. Cette année là, le 20 septembre 1779, César est nommé secrétaire du Roi de la Grande Chancellerie de France (Louis XVI) . Il porte le titre de Trésorier de France.  Il a fait fortune. Il achète le château seigneurial de Sucy en Brie le 17 novembre 1780. 

En 1782, Jeanne CHARPIN vend l’hôtel particulier de Montmartre où elle logeait avec feu son mari, l’hôtel LABAT.

Extrait du bulletin de la Société d'Histoire et d'Archéologie du XVIII ème arrondissement "Le Vieux Montmartre" - revue trimestrielle des travaux de la société - 30 ème fascicule - premier trimestre 1897 - L'Hôtel LABAT par Charles SELLIER membre du comité - Cliquer sur l'image pour lire le document sur GALLICA

En 1785, César prend sous son aile un de ses neveux, Joseph César fils de Guillaume GINOUX et de Marie Claire FAVRIN. Ses parents l’envoient,  en tant que fils aîné, à l’Académie royale de Juilly (sorte d’ENA de l’époque). Joseph César  termine ses études à l’Académie Royale en 1792. Il est immédiatement employé dans l’administration du Domaine du Roi. Malheureusement, il décède à Paris le 17 août 1796 à l’âge de 20 ans.

Extrair du Dictionnaire biographique sur les pensionnaires de l'académie royale de Juilly (1651-1828) Tome II (1746-1795) Auteur : Etienne Broglin Edité en 2017

César GINOUX sous la Révolution

Laissons les mémoires d’Ernest de GINOUX nous éclairer pour cette période :

« Grâce à ce que, pendant les plus mauvais jours de la révolution, il fut, dans cette haute position administrateur des domaines), le collègue d’un membre de la Convention, GOHIER, depuis Président du Directoire, il put rendre de nombreux et grands services.

Il préserva notamment de l’échafaud plusieurs personnes de son pays natal.

Ses anciennes attaches avec la Cour, sa fortune et particulièrement la possession du château seigneurial de Sucy, étaient autant de titres à la persécution.

Sa liberté, sa vie même pouvaient être d’un jour à l’autre menacé. Il s’en préoccupa. Il réforma sa maison, loua un entresol sur la place Vendôme, réduisit sa domesticité et ne conserva qu’un cabriolet.

Restait le château qui, indépendamment de ce qu’il le compromettait, était exposé à  éprouver le sort de tant d’autres qui furent saccagés et brûlés.

pour prévenir ce double danger, il en fit la vente fictive à un Mr SCHICKLER, un allemand, qui était son ami (Note : probablement le père de Fernand de SCHICKLER, famille de banquiers).

Celui-ci s’y installa avec sa femme, et le véritable propriétaire put continuer à jouir de cette belle résidence et à satisfaire sa passion pour la chasse dans les bois qui en dépendaient. »

En 1790, lors de la création des départements, César est électeur du département de Paris, section des Tuileries. Il est toujours directeur de l’enregistrement et des domaines et procureur syndic de l’administration provinciale à 44 ans. Il demeure à l’hôtel de la Vallière, place du Petit Carroussel à Paris.

En 1792, sous la Terreur, il obtient une carte de sûreté lui permettant de circuler librement dans Paris. Il habite 609, rue du Bac.

César GINOUX sous la Première République

Après une condamnation des époux à verser des sommes considérables, en 1793, Jeanne CHARPIN demande la séparation des biens ce qui induit au préalable la renonciation à la communauté. Mais de fait, quand César récupère le château de Sucy, Jeanne reste avec lui et participe à l’administration du domaine. Ils essaient d’annuler leur séparation. Le tribunal confirme le divorce en 1798.

En 1796, César achète une ferme avec ses terres faisant partie du domaine de la seigneurie  de Grenelle pour la somme de 200 000 francs. Il est alors Administrateur de l’enregistrement et des domaines. Son neveu Joseph César décède au domicile de Jeanne CHARPIN, 26 boulevard Montmartre à Paris.

En 1799, César est envoyé en mission à Rome afin d’aider à la gestion des Etats pontificaux. Le Souverain Pontife, Pie VII, étant en exil. 

César à Rome

« Mon oncle ne fut même pas récompensé par la Pape Pie VII, mais sans qu’il y eût de la faute de celui-ci.

Il avait été chargé d’une mission analogue à celle qu’il devait remplir en Westphalie lorsque l’Etat Pontifical fut érigé en république en 1799.

De Rome ou il s’établit, il organisa les finances et une administration domaniale sur le modèle de ce qui existait en France. Il s’acquitte de cette mission avec tant de probité et de désintéressement que le chevalier ARTAUD de MONTOR, qui a écrit une Histoire de Pie VII, justement estimée, y fait de lui la mention la plus honorable.

Il rapporte même que lorsque le Souverain Pontife reprit possession de ses états ; il ne put se défendre d’admirer qu’ils eussent été si bien administrés.

Il y reconnut « l’œuvre d’un homme aussi honnête qu’habile » et témoigna sa gratitude en constituant au profit de mon oncle un majorat de la valeur de cent mille francs.

L’intention était généreuse, mais les mesures furent si mal prises, les mauvais vouloir créèrent tant de difficultés, mon oncle qui ne se rendit pas sur les lieux et se confia à des hommes d’affaires italiens montra tant de négligence que, de contestation en contestation, de prétexte en prétexte, le titulaire n’entra jamais en possession.

L’Empereur avait fait banqueroute, les ministres du Pape acquittèrent sa dette avec un « non possumus[1] » … ! »

Extrait des mémoires d’Ernest de GINOUX

[1] Littéralement « Nous ne pouvons pas »

Extrait du livre d'Artaud de Montor "Histoire de Pie VII"

César GINOUX sous Napoléon

Depuis probablement 1800, il accueille sa nièce Marie GINOUX, soeur de Joseph César dans son château de Sucy en Brie. Celle-ci va se marier au château le 15 avril 1805 avec son cousin Gabriel François GINOUX né à Malaucène (Vaucluse) et frère d’Hippolyte César GINOUX de LACOCHE. César loge à Paris 66, rue des Fossés du Temple. Le couple va lui aussi habiter Paris. Mais reviendra régulièrement à Sucy. César adopte sa nièce et accueille toute la famille. C’est Marie qui va hériter du Château. Elle s’occupe de son oncle jusqu’à son décès.

César au Royaume éphémère de Westphalie

« Mon oncle n’était pas causeur. Il lui arrivait cependant de sortir avec moi de sa réserve habituelle. Il me raconta un jour qu’il avait été directement en rapport avec l’Empereur. Il me disait :

« Lorsque fut créé le royaume de Westphalie, je reçus la mission d’organiser les majorats que l’Empereur devait distribuer à ses créatures ».

C’était en 1807. Je fus prévenu par le comte BEUGNOT, sous la direction de qui je devais opérer cet important travail, que je recevrais les instructions particulières du souverain. « Vous le trouverez sans doute de mauvaise humeur, me dit-il, parce que son frère Jérôme l’obsède de ses exigences. Ne vous en laissez pas troubler ! Ecoutez le, prenez note de ses recommandations, et quand vous me les aurez communiquées, nous aviserons ensemble ». Puis, s’apercevant de mon embarras, il ajouta : « Tout ira bien, vous verrez ».

Mandé aux Tuileries, je dis mon nom et je fus introduit aussitôt dans le cabinet de l’Empereur. A peine entré, je le vis paraître.

­   Le comte BEUGNOT, me dit-il sans aucun préambule, m’assure que vous êtes propre à remplir la mission qui vous est confiée. Je n’ai donc à vous recommander qu’une chose, la célérité.

Puis, m’indiquant du doigt sa propre table de travail : 

­   Asseyez-vous là, ajouta t’il et écrivez.

Je fis un effort pour dissimuler mon trouble. Je m’assis. Je fis glisser devant moi une feuille de papier, et j’avais à peine le temps de tremper une plume dans l’encrier, l’Empereur se mit à dicter.

Il se promenait dans le cabinet, une main dans son gilet, l’autre derrière le dos, et parla assez vite pour que, eussé-je eu tout mon sang froid, je ne pusse le suivre.

J’écrivis au hasard les premiers mots que je pus saisir au passage, mais bientôt ils ne se lièrent plus ensemble. Toute apparence d’idée avait disparu !

L’Empereur dictant toujours, je continuais à tracer des caractères de plus en plus incohérents ; je finis même par ne plus pouvoir me lire.

Enfin l’Empereur cessa de parler, et s’arrêtant devant moi :

­   Donnez, dit-il, en avançant la main.

Je présentais, tout tremblant, la feuille que je venais de couvrir de hiéroglyphes… L’Empereur la prit et me la rendit sans y avoir jeté les yeux.

­   Vous avez bien compris, dit-il, faites vite ; je vous récompenserai…

Le souffle avait été près de me manquer ! Je respirai, et l’Empereur m’ayant congédié avec un geste gracieux, je courus chez le comte BEUGNOT.

Après un rapide salut, sans prononcer une parole, je lui mis sous les yeux le papier que je venais de noircir de mon affreux griffonnage… Il comprit aussitôt, partit d’un grand éclat de rire, et, se hâtant de me rassurer :

­   L’Empereur m’a fait connaître ses instructions, me dit-il, j’ai rédigé moi-même, en me conformant à ses instructions le mémoire d’après lequel vous aurez à agir. Ces instructions, les voici.

Il prit un dossier sur son bureau et me le remit.

­   Mais alors, pourquoi l’Empereur m’a t’il fait appeler ? Demandai-je, stupéfait.

­   Pour vous dire ce que vous venez de me répéter : faites vite, et je vous récompenserai ! Le reste est dans le dossier que vous emportez.

Je me rendis à Cassel (note : Capitale du Royaume de Westphalie) accompagné d’un secrétaire. J’y fus installé par voie de réquisition, dans un bel hôtel que son propriétaire, un gentilhomme dissident, avait abandonné, pour n’être pas témoin de l’abaissement de son pays.

Je pouvais en disposer à mon gré ; les clefs de la cave me furent même offertes. Je ne consentis à occuper que les appartements indispensables et n’acceptai que les services d’un vieux serviteur auquel avait été probablement confié le soin d’empêcher qu’il fût abusé de rien.

Je me mis à l’œuvre sans retard et m’efforçai de faire vite et le mieux possible, mais ce ne fut pas sans peine.

Le roi Jérôme avait sans cesse pour lui et ses créatures des exigences incompatibles avec mon devoir. J’objectais mes instructions, mais il n’en était tenu nul compte.

Enfin, les objections n’obtenant rien, on eut recours aux politesses. Je fus invité aux fêtes de la Cour, admis au jeu de la reine, et même à des dîners presque intimes. Mais je restai inflexible.

Ma mission terminée, je m’attendais à ce que la parole impériale serait respectée. Mais la fortune avait cessé de sourire. L’invasion de l‘Espagne avait amené de graves complications. On levait des troupes. Le trésor était vide.

BREFON (?) m’ajourna, et on m’ajourna si bien que je fus acculé à la débâcle finale. Douze milles francs de frais de poste et de secrétaire que je réclamai en vain et qui ne me furent jamais remboursés, telle fut la récompense de mon zèle et de ma célérité… »

Extrait des mémoires d’Ernest de GINOUX

César est nommé maire de Sucy en Brie par le Préfet en 1806. Il le restera jusqu’à sa mort en 1838.

Jeanne CHARPIN, toujours divorcée de César, décède le 21 juillet 1812 à Paris.

César GINOUX et Louis XVIII, Charles X et Louis-Philippe

Le 9 août 1814, César est fait chevalier de l’ordre royal de la légion d’honneur (son dossier est ici) par Louis XVIII. Il habite 68, rue des Fossés du Temple.

En 1824, César vend les terres et la ferme de Grenelle  (dont une partie se trouve sur la commune de Vaugirard et l’autre sur celle de Paris) à Jean Léonard VIOLET et son épouse Marie Anne Victoire FONDANECHE demeurant à Paris 48, rue Hauteville.

La rue GINOUX à Paris, le mystère est levé !

« Le grand-oncle possédait à Grenelle où n’existaient alors que de rares habitations, des terrains loués tant bien que mal a des maraichers, acquis pour le prix de 240.000 francs.

Les capitaux se portèrent, en 1825, sur les constructions avec une sorte de fureur. On créa dans Paris des rues nouvelles, des passages, des quartiers entiers. Quand l’espace manqua, on se jeta sur la banlieue.

On entreprit de faire une ville de Grenelle et l’on offrit à mon grand oncle d’acquérir les terrains qu’il possédait ;

Il ne douta pas qu’il put en tirer un parti avantageux. Il fit d’abord la sourde oreille et laissa finalement croire qu’il avait des vues sur eux. Cette tactique réussit.

Il avait refusé 400.000 francs, puis 500.000… Comment lui disait-on : on vous offre des prix inouïs, et vous refusez ! Prenez garde, on n’y viendra plus. Qu’attendez-vous ?

Le grand oncle souriait. Il avait la conviction qu’il obtiendrait mieux…

On offrit en effet 700.000 francs. Cette fois, vous allez accepter, dit-on à l’oncle ! Non ! Comment non ! Vous verrez qu’on ne viendra plus !

­   On reviendra, dit l’oncle !

On revient en effet, on offrit un million. C’était le chiffre auquel le grand oncle avait résolu d’aboutir !

­   J’accepte, dit-il, mais a une condition. C’est que vous donnerez trente mille francs d’épingles à cette enfant et il montra Sylvie (note : elle est la fille de sa nièce Marie GINOUX, elle est âgée d’environ 18 ans) qui faisait un devoir dans un coin du salon, sur une petite table.

Le négociateur fit également ses conditions. Il demanda que le grand-oncle bâtît la première maison, ce qui fut fait, et la municipalité reconnaissante donna le nom de GINOUX à la principale rue de la ville nouvelle[1]. »

Extrait des mémoires d’Ernest de GINOUX

[1] La rue Ginoux à Paris, va de la rue Héricart à la rue de Lourmel, longueur 330 m remplace en 1864 la rue Baran appelée avant, le Passage (archives de la famille)

En 1831, il est élevé au grade d’officier de la légion d’honneur.

En 1834, le Roi Louis Philippe lui offre son portrait en remerciement des quarante orangers qu’il lui a offert.

En 1836, le recensement de la population de Sucy en Brie liste dans le château : César 90 ans, Gabriel Raymond GINOUX, 67 ans, Marie GINOUX, 53 ans (les enfants du couple sont décédés) et 10 domestiques, régisseur et cuisiniers et 6 enfants de ceux-ci. 

il décède le 23 décembre 1838 à l’âge de 92 ans.

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