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L’arrêt de Mérindol 1540

Le contexte économique

Le comté de Provence a fusionné avec la France en 1487. François 1er est qualifié de roi de France, comte de Provence, Forcalquier et terres adjacentes.  Le comté côtoie deux états étrangers : un territoire du pape (Avignon et le Comtat Venaissin) et la Savoie.

La population de la Provence a été décimée par les guerres et les épidémies. Une nouvelle main d’oeuvre  est nécessaire pour remettre en valeur les terres possédées par la noblesse laïque et ecclésiastique. Dans le Lubéron, les seigneurs rédigent des actes d’habitation  pour installer des familles sur leurs terres. Ces familles pourront les faire fructifier, payer des redevances, réaliser des corvées… 

Les seigneurs ne demandent pas leur religion aux futurs colons. L’important est de refaire vivre leurs territoires.

Liste des actes d’habitation dans le Luberon et sur l’autre rive de la Durance :

Année

  • 1465
  • 1471
  • 1480
  • 1491
  • 1495
  • 1501
  • 1504
  • 1505
  • 1506
  • 1507
  • 1508
  • 1511
  • 1512
  • 1514
  • 1521

Village

  • Joucas
  • Corbières
  • Lourmarin
  • Le Castelet en Luberon
  • Cabrières d’Aigues
  • Gignac
  • Mérindol
  • Vitrolles et La Motte d’Aigues
  • Saint Martin de la Brasque et Pépin d’Aigues
  • Saint Estève Janson
  • Roquefure et Murs
  • Villelaure
  • Buoux
  • La Roque d’Anthéron
  • Saint Martin de Castillon

Seigneur

  • Commandeur de l’ordre de Malte
  • Les Abbés de Valsainte
  • Foulques d’Agoult
  • Jacques de Forcalquier
  • Raymond d’Agoult
  • Raymond d’Agoult
  • Évèque de Marseille
  • Gaucher de Brancas
  • Antoine René de Bouliers
  • Jean de Forbin
  • Évèque d’Apt
  • Jean de Forbin
  • x
  • Jean de Forbin
  • x

En 1540, les familles de colons ont prospéré. Le nombre d’habitants s’est accru. Les terres ne nourrissent plus suffisamment la population. 

La recherche des hérétiques

 Au niveau religieux, les idées de Luther sont répandues et inquiètent le roi de France, François 1er.

Jusqu’ici la première instance des crimes pour hérésie relevait de l’officialité, tribunal de l’évêque ou du sénéchal, le Parlement intervenant seulement en appel.

En 1540, le roi ordonne au Parlement d’Aix en Provence de juger en première instance les hérétiques de Provence. Il demande au comte de Tende, gouverneur de la Provence en résidence à Toulon, de prêter main forte au Parlement de Provence. Ayant reçu la lettre patente du Roi, ce dernier met en oeuvre une procédure afin d’assumer cette nouvelle fonction.  

  • Faire le point des procès antérieurs et en cours contre les hérétiques
    • l’évêque d’Apt nomme en, 1530, un inquisiteur de son diocèse, le dominicain Jean de ROMA. Celui-ci poursuit pour hérésie 150 personnes dont le Parlement se procure la liste, ainsi que la liste des abjurations. L’interrogatoire d’un des inculpés, Pierre GRIOT, apprenti barbe, signale un certain Jean SERRE, barbe qui l’a formé.
    • en 1539, Jean SERRE, le boiteux de Murs, barbe vaudois est arrêté avec un certain Antoine GARBILLE, prêtre. Ces deux  arrestations ont permis de poursuivre 177 accusés d’hérésie.

Devant la période d’été pendant lequel les conseillers sont en vacances, le nombre d’accusés, leur répartition dans de nombreux villages du Luberon et quelques uns dispersés dans tout le reste de la Provence (Alpes de Haute Provence, Var, Bouches du Rhône), le Parlement semble débordé par la situation. De plus, Jean SERRE dénonce tous ceux de Mérindol sauf 5 à 6 maisons et Antoine GARBILLE fournit une liste des habitants suspects d’hérésie. Le Parlement  de Provence agissant dans l’urgence choisit de s’occuper de Mérindol en premier lieu.

L'arrêt de Mérindol

Cet arrêt publié le 18 novembre 1540 ne sera exécuté qu’en 1545. François 1er, ayant encore besoin des réformés du royaume dans sa lutte contre Charles Quint, va attendre le moment opportun pour le faire exécuter par le Parlement de Provence le 1er janvier 1545.

Liste des accusés

  • François MAYNARD
  • Jacques MAYNARD
  • Michel MAYNARD
  • Jean PONS et sa femme
  • FACY le Tournejayre (potier) et sa femme
  • Berthin VYAN et sa femme
  • Jean PELLENQ et sa femme
  • Peyron REY
  • Philipon MAYNARD
  • Jacques de SAVIGNY, maître d’école
  • Maître Hélion BARBEROUX
  • Claude FAVIER
  • POMERY libraire et Marthe sa femme, ancienne religieuse à Nîmes
  • Thomas PELLENQ du Plan d’Apt
  • Guillaume Le NORMAND

Charges retenues

Vu l’impossibilité d’arrêter les accusés malgré toutes les démarches entreprises par le procureur du roi,

Vu la lettre du roi  de mai 1540 adressée à la Cour pour condamner les vaudois, luthériens et autres non conformes à nla foi et la religion chrétienne,

Vu les autres lettres du roi du 16 juillet 1535 et du 31 mai 1536 pardonnant et graciant les accusés et suspectés d’erreurs hérétiques sous condition d’abjuration dans les 6 mois,

Vu les résultats de l’enquête menée par le procureur général qui fait apparaître que tous ceux de Mérindol font partie de sectes vaudoises et luthérienne contraires à la sainte foi et religion chrétienne, qu’ils hébergent des étrangers fugitifs des mêmes sectes, que au dit lieu il y a une école qui enseigne ces erreurs et des libraires qui impriment et vendent des livres pleins de fausses doctrines.  

Vu que les accusés, leurs complices et leurs biens sont cachés dans les rochers et les bois de Mérindol où ils ont des bastides et des cavernes pour se protéger.

Vu que, suite à la condamnation de Collin PELLENQ du Plan d’Apt comme chef des sectes vaudoise et luthérienne à être brûlé vif et ses biens confisqués, des gens de Mérindol et leurs complices se sont rassemblés au nombre de 140, armés d’arquebuses, de hallebardes et d’épées. Ils ont détruit le moulin de Collin PELLENQ et son frère Thomas, battu le meunier en le menaçant afin que personne n’utilise les biens confisqués de leur secte.

Condamnations

Tous ceci considéré, la Cour  condamne par contumace les accusés à être brûlés vifs :

  • BARBEROUX et FAVIER sur la place publique de Tourves (entre Saint Maximin la Sainte Baume et Brignolles dans le Var).
  • Thomas PELLENQ sur la place publique d’Apt.
  • Les autres sur la place des jacopins à Aix en Provence (probablement la place actuelle des prêcheurs devant le palais comtal où siège le Parlement, à l’emplacement du Palais de Justice).

Les femmes, enfants, serviteurs et famille de tous les condamnés seront jugés. En cas d’impossibilité de capturer les accusés et leurs familles dès maintenant, ils sont tous bannis du royaume, terres et seigneuries du roi. 

Il est interdit à tout gentilhomme, vassal et autre sujet du roi de recevoir et d’héberger les dits condamnés et leurs familles, ni de leur offrir une aide quelconque sous peine de confiscation de leurs biens et d’autres peines.

En plus, comme toute la ville de Mérindol est le lieu de vie des gens professant la religion réformée, la Cour ordonne la démolition de toutes les maisons et bastides de ce lieu. Le dit lieu doit être rendu inhabitable. les repaires des accusés dans les châteaux, cavernes, rochers et les bois du terroir de Mérindol seront ruinés afin que personne ne puisse s’y fortifier. Les bois seront coupés et abattus jusqu’à 200 pas aux alentours.

Il sera fait interdiction de louer les terres du dit lieu à ceux qui appartiennent à la lignée de chacun des condamnés et à ceux qui portent le même nom.

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